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Rare mais pas impossible, le suicide du pilote est régulièrement cité parmi les hypothèses permettant d’expliquer la disparition du Boeing de Malaysia Airlines. Une piste qui soulève des questions de préparation et de suivi psychologique de l’équipage. Près de sept jours après la disparition du vol MH370 de la compagnie Malaysia Airlines, les autorités malaisiennes et vietnamiennes n’ont toujours pas retrouvé le moindre indice en mer.
Plus les jours passent, plus les zones de recherche se multiplient. Et avec elles, son lot d’explications à la disparition du Boeing 777 de la compagnie Malaysia Airlines voilà bientôt une semaine. Parmi les scénarios évoqués, le suicide du commandant de bord en plein vol. Un drame humain qui répresente moins de 0,5% des accidents aériens mortels, selon les chiffres de l’agence américaine de l’aviation civile (FAA). Cette piste permettrait de comprendre pourquoi aucun signal de détresse n’a été envoyé du cockpit et pourquoi tous les moyens de signalisation ont été coupés. Or explosion soudaine, seul un acte délibéré peut empêcher toute localisation. « C’est possible et c’est même compatible avec les éléments mécaniques que nous avons. Je ne fais aucune hiérarchie dans les hypothèses », assure Gérard Feldzer, expert en aéronautique et ancien pilote de ligne.

Instinct de survie ou non?

Se pose néanmoins la question du rôle du co-pilote. Aurait-il pu ne rien voir? « Pas s’il est aux toilettes et que le suicidaire s’est enfermé dans le cockpit », avance un pilote d’Air France. D’autant que l’appareil a disparu des radars une heure après le décollage, un moment où l’équipage peut relâcher sa vigilance. Si on parle du pilote en raison des connaissances requises, il est également possible qu’un autre membre de l’équipage, voire un passager se soit introduit dans le cockpit à des fins suicidaires. « J’ai déjà eu des passagers qui ont pris mes manettes », jure Gérard Feldzer. A  en croire Le Figaro, la piste du suicide du pilote avait déjà été évoquée lors de l’accident du vol Rio-Paris. Mais les médecins auraient estimé à l’époque que l’instinct de survie n’était pas compatible avec les trois minutes requises durant lesquelles l’avion a plongé du nez. Contacté par L’Express, le psychiatre Christian Navarre, auteur de « Psy » des catastrophes, n’est pas du même avis. « Il y a deux types de suicidaires, les impulsifs et les déterminés. Pour ces derniers, l’instinct de survie se maîtrise, il y a aucune raison qu’ils changent d’avis. Le 11 septembre, les kamikazes ont bien vu les tours arriver! » Selon lui, il est peu probable que l’acte relève du coup de folie tant l’idée même demande de la préparation mentale et que d’autres vies sont en jeu.

Quel suivi pour les pilotes?

Pour l’heure, les informations diffusées concernant l’équipage sont restreintes. Tout juste savons-nous que le pilote est âgé de 53 ans et qu’il est expérimenté – plus de 18 000 heures de vol à son compteur, rapporte l’agence Reuters. Rien en ce qui concerne son état psychologique. Difficile d’ailleurs de savoir comment sont suivis et contrôlés les pilotes en Malaisie.
En France en revanche, les pilotes ont l’obligation de se soumettre à un examen médical annuel dans un centre d’expertise médicale spécialisé et agréé par la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), explique-t-on à Air France. « C’est pas à une visite médicale qu’on va détecter si vous êtes dingo! », raille Gérard Feldzer. « La médecine ne peut pas tout, allez savoir ce qui se dit dans le cerveau des suicidaires ».
Selon un pilote d’Air France, les questions posées lors de l’examen restent assez générales. « C’est du type, ‘Satisfait du boulot? La famille, ça va?' » En revanche, les pilotes sont formés pour faire face à une défaillance de son co-équipier lors des simulations. Ils doivent notamment réagir face à une manipulation de mauvaises commandes. « Mais on apprend pas encore comment stopper un collègue en train de se suicider! », prévient le pilote.

Mêmes s’ils sont rares, les accidents liés à un suicide du pilote se sont déjà produits. En 1999, le vol 990 de la compagnie EgyptAir s’écrase dans l’Atlantique avec 217 personnes à bord. Les boites noires indiquent que le pilote a délibérément provoqué l’accident. « J’ai pris ma décision maintenant. Je remets ma foi dans les mains de Dieu », déclare-t-il quelques minutes avant. En 1997, le crash d’un Boeing 737 fait 104 morts. Les autorités concluent à un suicide du commandant de bord. D’autres drames humains de ce type ont aussi été constatés au Maroc et au Japon.
Boeing 777: un avion peut-il vraiment disparaître sans laisser de trace?
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42 navires, 39 avions et 12 pays impliqués.
C’est peu dire que les opérations pour retrouver le vol MH370 qui reliait Kuala-Lumpur à Pékin mobilisent de gros moyens. Pourtant, au sixième jour, toujours aucune trace confirmée de l’appareil. Les éventuels débris dans la mer repérés par un satellite chinois n’ont pas été retrouvés par l’aviation vietnamienne dépêchée sur place. Mercredi, les autorités malaisiennes ont par ailleurs étendu la zone de recherche où le Boeing 777 a donné pour la dernière fois son signalement.  Même si elle redonne un nouvel espoir, cette nouvelle piste est à prendre avec précaution tant les derniers jours ont été infructueux. Et plusieurs débris retrouvés ont été trop vite, à tort, attribués au vol de la Malaysia Airlines. Les recherches s’apparentent à un travail de fourmi. « Dans le cadre des opérations pour retrouver le vol Rio-Paris, on a été confrontés aux mêmes difficultés, entre les faux débris et les fausses traces de carburant. On n’a retrouvé des éléments qu’au bout du sixième jour », nuance-t-on du côté du Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) pour la sécurité de l’aviation civile. L’étendue de la zone de recherche pose aussi problème: 90 000 kilomètres carré, soit l’équivalent de la superficie du Portugal. Mais elle reste plus proche des côtes que dans le cas du vol Rio-Paris. « Même si le signal de l’avion a été perdu seulement une heure après son décollage, étant donné sa vitesse de 800 km/h, l’appareil peut se trouver à des centaines de kilomètres de son point de départ », observe néanmoins l’ancien commandant de bord Jean Serrat pour BFMTV.  Or seules les boites noires, situées sur l’appareil, pourront résoudre le mystère de sa disparition. Avec la technologie actuelle, il est pourtant possible que ces dernières transmettent en temps réel les informations de vol au lieu de les enregistrer. Mais ce dispositif coûte cher et les compagnies sont réticentes à l’installer. « Les accidents en pleine mer, cela reste rare. Mais c’est un débat qui doit avoir lieu », soupire Gérard Feldzer, expert en aéronautique.

Seule une explosion peut expliquer une disparition instantanée

L’absence de cette technologie soulève une autre zone d’ombre: les raisons de la disparition soudaine de l’appareil des écrans radars. Sur la plupart des vols aujourd’hui, un avion est localisable de trois manières: par la radio du cockpit, par les radars – au nombre de deux – et par le système ACARS, qui permet de transmettre des données liées à la maintenance de l’appareil, comme l’état du moteur. Si Malaysia Airlines a assuré que le Boeing en était équipé, la compagnie n’a pas indiqué si des messages automatiques ont été reçus.
Pour perdre la trace du vol, il faudrait donc que tous ces moyens deviennent inopérants quasi-simultanément. « L’hypothèse la plus probable est que l’avion a explosé dans les airs », avance Gérard Feldzer. « On peut imaginer un réservoir qui prend feu, voire une bombe à bord. » Contacté par L’Express, un pilote d’Air France, qui a l’habitude de voler sur ce type d’appareil, assure qu’aucune panne simple ne peut en tout cas expliquer la perte de localisation. Or, les Boeing 777 sont réputés fiables. « Il faudrait une succession d’évènements qui détériorent les circuits hydrauliques, électriques et pneumatiques de l’avion. De quoi débrider complètement la capacité de réaction de l’équipage et les automatismes de la machine. En gros, rien de ce qui est prévu dans les entraînements de pilote. »

Le pilote peut-il rendre lui même invisible l’appareil?

En dehors d’une explosion brutale, une autre hypothèse serait que l’avion se soit abîmé en mer, après une avarie ou un acte délibéré. Mais à moins que la radio soit devenue défaillante, le pilote aurait normalement dû transmettre un signal de détresse. Même si dans le cas du vol Rio-Paris, l’équipage était trop préoccupé à régler les problèmes techniques pendant que l’appareil piquait du nez.

Un peu plus farfelue, une dernière piste voudrait que le pilote ait voulu lui même rendre le Boeing invisible avant de le déposer ailleurs. D’autant que, selon la Malaisie, l’appareil a peut-être fait demi-tour avant de disparaître. Dans ce schéma, il faudrait que le pilote désactive l’ensemble des systèmes de localisation – dont l’ACARS . « Il faut bien connaître son avion. Même sur les simulateurs, on n’explique pas comment le faire », prévient le pilote d’Air France. Dans le cas où il y arriverait, il faudrait ensuite que l’avion vole en rase-motte pour ne pas être détecté par les satellites. Mais pour aller où? « Il n’y a pas de terrains inconnus sur Terre. S’il s’était posé quelque part, on l’aurait déjà su », raille Gérard Feldzer. De quoi accréditer la thèse selon laquelle l’appareil se trouve au fond de la mer.
L’avion disparu de Malaysia Airlines
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Bon comme un citron bien rond !