Le parti Ennahdha noyaute tous les rouages de la société tunisienne pour imposer sa vision d’un islam rigoriste.
D’un côté le bon docteur Ghannouchi, guide de la formation islamiste Ennahdha, qui se veut rassurant, comme un bon grand-père à la barbe blanche. « Nous avons accepté que soient inscrites dans la Constitution les libertés du culte et de la conscience bien que nos bases refusent totalement ce choix », explique-t-il sans rire dans une interview au quotidien la Presse. De l’autre, les pratiques de ce mouvement. Des centaines de mosquées sont maintenant aux mains des salafistes qui ont évincé les imams traditionnels sans que le pouvoir ne réagisse. Selon certains membres des services de sécurité, nombre de ces mosquées seraient transformées en dépôt d’armes. Quand on sait la tension sécuritaire existant actuellement dans le pays, la mort de plusieurs soldats en opération contre un groupe djihadiste dans le mont Châambi, l’incapacité du gouvernement à retrouver les assassins des députés Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, on peut se poser un certain nombre de questions sur les volontés réelles du pouvoir.
Ainsi, il y a peu, le porte-parole du groupe salafiste Ansar al-Charia déclarait, sur un plateau de télévision, vénérer la mémoire de Ben Laden et adhérer pleinement à l’idéologie d’al-Qaida. Il a, depuis, été intégré au ministère de l’Éducation nationale ! Lors d’un concours pour intégrer le corps de police, l’une des questions posées portait sur la date à laquelle avait eu lieu la première amputation d’une main féminine (et n’a été retirée qu’après le tollé provoqué) ! Le chef d’Ansar al-Charia n’est autre que Abou Iyadh, aujourd’hui en fuite après l’attaque de l’ambassade américaine à Tunis. Et plusieurs de ses membres sont soupçonnés d’avoir participé à l’assassinat de Belaïd et Brahmi. Quoi d’étonnant lorsqu’on se souvient que Rachid Ghannouchi discourait sur ses « enfants, les salafistes djihadistes qui me rappellent ma jeunesse » ou que le premier ministre, Ali Larayedh, ne voulait voir dans les camps d’entraînement djihadistes tunisiens que « des individus qui faisaient du sport » (sic) ? C’est cela aussi que refusent ces Tunisiens, musulmans qui manifestent contre Ennahdha et leur vision étroite et rigoriste de l’Islam prenant sa source dans le wahhabisme, loin de l’histoire de la Tunisie moderne.
Tunisie: violences et grèves à Siliana et Gafsa

Close up of Tunisian first lady Leila Ben Ali presiding over a meeting of the Arab Women Organisation in November 2010. Full story:
Deux grèves ont dégénéré mercredi en violences dans deux villes de Tunisie, où la grogne sociale s’amplifie dans un contexte de grave crise politique.
Des dizaines de protestataires, des jeunes pour la plupart, ont ouvert les hostilités à Siliana (150 km au sud-ouest de Tunis) en jetant des pierres sur la police qui a tenté de les disperser en les pourchassant et par des tirs de lacrymogènes. Des blessés légers, notamment des policiers souffrant de coupures, ont été soignés à l’hôpital, a constaté un photographe de l’AFP lui-même touché à la tête.
Des barrages de pneus en feu et de ferraille ont été dressés par les manifestants sur l’axe principal de Siliana et les rues étaient jonchées de projectiles. En soirée, des affrontements sporadiques avaient encore lieu.
Les violences ont aussi gagné la cité de Gafsa (centre). La police y a d’abord repoussé des manifestants qui tentaient d’envahir le siège du gouverneur, puis des centaines de protestataires ont attaqué le siège du parti Ennahda qui dirige le gouvernement. Les locaux ont été saccagés puis partiellement incendiés. Les manifestants ont aussi mis le feu au mobilier dans la rue et empêché les pompiers de se rendre sur les lieux.
Le représentant du parti Ennahda sur place, a dénoncé l’inaction de la police. « Nous avons appelé la police et ils ne sont pas venus », a accusé Mohsen Soudani à la radio Shems FM, ajoutant: « j’ai dis aux enfants d’Ennahda de la région de ne pas riposter ».
Le Gouvernement accusé de tous les maux
Le gouvernement n’avait pas réagi pour sa part en début de soirée à ces violences.
Trois régions tunisiennes –Siliana, Gafsa et Gabès (ouest)– étaient paralysées mercredi par des grèves contre divers mesures des autorités.
A Siliana, il s’agissait de marquer le 1er anniversaire de la répression d’un mouvement social qui avait fait en trois jours quelque 300 blessés, notamment par des tirs de chevrotine.
Le syndicat UGTT, organisateur de la grève, reproche au pouvoir de ne pas avoir pris en charge les blessés ni investi dans le développement économique régional comme il l’avait promis à l’époque.
« Le gouvernement n’a pas tenu ses engagements contenus dans la convention de décembre 2012 qui prévoit qu’il s’occupera des soins des blessés et de leurs besoins matériels et physiques », a expliqué, avant les heurts, le secrétaire général adjoint de l’union régionale de l’UGTT, Ahmed Chefaï. A Gafsa et Gabès, les grèves ont été décidées pour protester contre la décision de ne pas inclure ces régions à la liste de celles où des centres hospitaliers universitaires seront bâtis dans les prochaines années. Les organisateurs ont interprété cette décision comme la preuve que le gouvernement ne lutte pas contre les disparités de développement entre les régions, un des facteurs de la révolution de 2011 qui avait été largement nourrie par des revendications sociales.
Pauvreté et blocage politique
A Gafsa, des heurts ont lieu régulièrement et le local d’Ennahda a déjà été attaqué. La localité a été le théâtre d’une insurrection réprimée en 2008 dans le sang par le régime de Zine El Abidine Ben Ali, lui-même renversé lors de la révolution de janvier 2011. Cette région est stratégique en raison de ses mines de phosphates mais reste parmi les plus pauvres du pays. Depuis la révolution, la production minière y est à 30% de ses capacités en raison des nombreux mouvements sociaux et malgré l’embauche de milliers de personnes pour tenter de juguler la grogne.
Les grèves et débrayages se sont multipliés ces dernières semaines alors que l’économie peine à redémarrer, faute d’une croissance suffisante pour réduire le chômage et la misère de manière significative.
Ce contexte économique et social difficile est aggravé par une crise politique qui paralyse les institutions depuis fin juillet après l’assassinat d’un opposant attribué à la mouvance jihadiste.
Le gouvernement s’est engagé fin octobre à démissionner pour résoudre l’impasse, mais il est toujours en place, islamistes et opposants ne parvenant pas à s’entendre sur le nom d’un Premier ministre indépendant.
« La classe moyenne s’effrite, la pauvreté augmente et le blocage politique a entraîné cette situation de recours excessif à la grève »
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