C’est à Slaviansk, 130.000 habitants, carrefour industriel important ­situé entre Donetsk et Kharkiv, que le premier assaut des forces de sécurité ukrainiennes a eu lieu.
Pro-Russian armed men stand guard while pro-Russian protesters gather near the police headquarters in Slaviansk
Il n’aura fallu que 50 kilomètres après les faubourgs de Donetsk pour rencontrer le premier check-point prorusse, cette porte d’entrée, bricolée de bric et de broc, vers un nouveau monde, définitivement hors de l’Ukraine, quelque part entre indépendantisme et irrédentisme russe. C’est à Slaviansk, 130.000 habitants, carrefour industriel important ­situé entre Donetsk et Kharkiv, que le premier assaut des forces de sécurité ukrainienne a eu lieu. Samedi, alors qu’une tentative de prise du commissariat de Donetsk échouait, des groupes séparatistes prorusses se sont emparés de bâtiments publics et de commissariats de police dans trois villes de la région, dont Slaviansk. Les forces prorusses, suppléées par des éléments russes, y auraient mis la main sur un arsenal de 20 fusils automatiques et 400 pistolets Makarov. Dimanche, au petit matin, le gouvernement ukrainien, acculé par une semaine de contestation séparatiste à l’est, a donc lancé une «opération antiterroriste» de reconquête.
A man looks at a graffiti produced to support the territorial integrity of Ukraine and to protest Russia's annexation of Crimea in Odessa
Le ministre de l’Intérieur ukrainien, Arsen Avakov, a rapidement fait état de «morts et blessés des deux côtés», un tué et cinq blessés du côté des forces loyalistes, et «un nombre indéterminé» chez les séparatistes. «Des unités antiterroristes sous le commandement du SBU sont passées à l’action ce matin. Nous avons des informations selon lesquelles des officiers du GRU (le service de renseignement militaire de l’armée russe) sont infiltrés au sein des activistes prorusses», indiquait à la mi-journée une source au sein du Conseil national de défense à Kiev, jointe au téléphone.
La ville de Slaviansk est entourée de quatre check-points qui obligent à prendre le chemin des écoliers pour entrer dans le centre-ville. Une fois dans la rue principale, des hommes qui arborent le ruban orange et noir des sympathisants prorusses fouillent le coffre de chaque voiture qui s’approche du camp retranché du commissariat de police d’arrondissement. Aux alentours, aucune trace des policiers ou d’éventuelles forces aux ordres de Kiev.
Armed pro-Russian protesters escort a comrade who is carrying an icon, which they said was found in the seized office of the SBU state security service, in Luhansk
Ils sont plusieurs dizaines à être retranchés à l’intérieur de barricades de pneus et de barbelés, sévérement gardées par de jeunes activistes armés de boucliers. Certains sont armés de battes de base-ball, d’autres de haches. De temps à autre, un milicien en uniforme noir ou kaki passe dans la cour une kalachnikov à la main. Seul endroit inaccessible, les étages du bâtiment central du commissariat, dans le hall duquel les hommes lourdement armés sont nombreux. «Ce matin, tout était absolument calme ici», indique un homme masqué qui s’improvise porte-parole des séparatistes. «Il n’y a eu aucun assaut sur le commissariat, il y a juste eu quelques tirs en dehors de la ville, aux alentours des check-points», assure-t-il. Chaque personne rencontrée porte un regard différent sur les événements de la journée. Alexandra, 28 ans, originaire de la ville, croit savoir que cinq personnes ont été tuées dans les affrontements. Elle en est certaine, «ce sont les fascistes de Pravy Sektor qui sont venus à Slaviansk en portant des uniformes de l’armée ukrainienne». La jeune femme est à l’affût de la moindre rumeur. «Il y a aussi des soldats américains qui portent l’uniforme ukrainien. Quelqu’un a retrouvé des balles au calibre de l’Otan», croit-elle savoir.
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La solution du référendum

«Je suis juste une femme du peuple!» répète trois fois Elena, qui est à l’initiative d’une «organisation citoyenne» de Drouzhovska, ville située à une cinquantaine de kilomètres de là. Elena est venue avec plusieurs amies soutenir les activistes de Slaviansk et «montrer que nous sommes contre ce pouvoir illégal qui ignore nos droits et nos demandes». Pour elle, il n’y a qu’une seule solution à la crise: un référendum. «Nous voulons créer une république du sud-est de l’Ukraine, nous voulons une vie indépendante de cette junte de fascistes de Kiev. Mais, avant tout, je veux être chez moi, c’est-à-dire en Russie.» À Kramatorsk, à 15 km de là, environ 400 manifestants font le piquet devant la mairie. Des femmes distribuent des sandwichs et du thé dans une tente sous un tableau de Nicolas II et de la famille impériale russe. Certains veulent «une République indépendante du Donbass au sein d’une Ukraine fédéralisée», d’autres tout simplement se rattacher à la Russie.

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Bon comme un citron bien rond !