En criant au loup, en déployant ses forces, le président russe est-il en train de créer les conditions de « finir le boulot » interrompu début 2015, en justifiant une partition de l’Ukraine, voire en faisant chuter le pouvoir de Kiev ?

S’il fallait désigner une « personnalité de l’été » dans le monde, ce ne serait pas nécessairement Recep Tayyip Erdogan, le président turc, qui fait les gros titres depuis qu’il a surmonté une tentative de putsch le 15 juillet et repris le contrôle par une purge monumentale. Non, le titre devrait plutôt revenir à Vladimir Poutine, qui n’a cessé d’avancer ses pions tout l’été.

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Tandis que Barack Obama passait ses dernières vacances de président à Martha’s Vineyard et déployait son soft power en rendant publique sa playlist, son homologue russe faisait du hard power : il rencontrait le président turc, avec lequel il était en froid polaire, faisait bombarder les positions rebelles dans le nord de la Syrie, déployait des missiles de défense antiaérienne S-400 en Crimée annexée et menaçait l’Ukraine de représailles après avoir accusé Kiev de fomenter des attentats, tout cela dans la même semaine.

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Sans oublier le rôle qui lui est attribué dans les élections américaines : il suffit en tout cas de lire les médias russes à destination de l’étranger, comme Sputnik ou RT, pour voir qu’ils font ouvertement campagne pour Donald Trump !

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Petite ou grande provocation.

Cet activisme du président russe est conforme à son style très personnel, et chacun de ces actes est une petite ou grande provocation en direction des Occidentaux, avec lesquels il s’est engagé dans un jeu complexe.

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Sa rencontre de Saint-Pétersbourg avec Erdogan constitue un vrai « coup » diplomatique : la Turquie, membre de l’Otan, est l’alliée historique des Etats-Unis, et pourtant c’est à Poutine qu’Erdogan réserve son premier sommet post-coup d’Etat ; et il faudra attendre le 24 août pour qu’un contact de haut niveau ait lieu avec les Américains. Une manière pour Erdogan de montrer sa mauvaise humeur vis-à-vis des Etats-Unis, accusés, au minimum, d’ambiguïtés dans le coup de force du 15 juillet, mais aussi d’exprimer une indépendance stratégique nouvelle de la part de ce pays clé de la région.

Télé, magouilles, KGB… Ils ont connu Poutine, ils le racontent.

Télé, magouilles, KGB... Ils ont connu Poutine, ils le racontent
Le président russe à Ankara, en décembre 2014. (AFP PHOTO / STRINGER)

Ils l’ont fréquenté et ont percé une part du mystère du président russe. Leurs récits permettent de dresser le portrait de l’un des hommes les plus secrets et les plus puissants de la planète.

Mais c’est surtout en Ukraine que Poutine joue gros : il prend le risque de rallumer un conflit qui était maîtrisé depuis les accords de Minsk, signés sous le double parrainage franco-allemand le 12 février 2015. Il envoie donc un signal clair à Paris et à Berlin sur le peu de poids qu’il leur accorde dans ce processus.

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En Syrie comme en Ukraine.

En criant au loup, en déployant ses forces, le président russe est-il en train de créer les conditions de « finir le boulot » interrompu début 2015, en justifiant une partition de l’Ukraine, voire en faisant chuter le pouvoir de Kiev ? Difficile de lire les intentions tactiques réelles de Vladimir Poutine, il est certain qu’il ne fait pas tout ça « gratuitement », sans arrière-pensées. De fait, il constitue un véritable casse-tête stratégique pour les Européens et les Américains.

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Il n’a pas donné signe de vie à son peuple. On ne l’a plus vu à la télévision. Plus entendu à la radio. D’ordinaire omniprésent, il a annulé tous les rendez-vous inscrits sur son agenda. Il n’a même pas assisté, comme chaque année, à la rencontre annuelle de l’ex-KGB, son corps d’origine. Entre le 6 et le 16 mars – une éternité –, les Russes ne savaient pas où était passé le maître du Kremlin. Ni s’il était encore en vie.

A Moscou, la vie politique s’est arrêtée. Toute la Russie a retenu son souffle. La panique a gagné les cercles dirigeants – le peuple aussi. Car, de Saint-Pétersbourg à Vladivostok, le fonctionnement du pays le plus vaste du monde ne repose que sur un seul homme : un ex-espion de 62 ans, Vladimir Vladimirovitch Poutine, dit « VVP ».

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L’évocation d’une nouvelle guerre froide relève de la paresse intellectuelle tant le contexte est différent, et l’ambition russe, sans commune mesure avec celle de . Pour autant, Poutine veut-il simplement replacer la Russie parmi les « grands » ? recréer un « espace vital » sécurisé ? Ou a-t-il des ambitions plus vastes encore?

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Nouvelle Russie : le rêve interrompu de Poutine.

Nouvelle Russie : le rêve interrompu de Poutine
Un rebelle pro-russe dans un village près de Debaltseve, le 26 mars 2015. (DIMITAR DILKOFF / AFP)

A Moscou, les ultranationalistes n’ont plus le vent en poupe. Le chef du Kremlin a dû faire une pause dans l’annexion des « terres russes » d’Ukraine. Son projet de Nouvelle Russie attendra. Mais combien de temps ?

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Alexandre Prokhanov adore jouer les affreux. Et ce n’est pas un rôle de composition. A 77 ans, il est, depuis sa fondation en 1993, le rédacteur en chef de « Zavtra » (« Demain »), l’hebdomadaire ultranationaliste russe, violemment anti-occidental, anti-américain et, bien sûr, antisémite et homophobe. Dans son bureau en désordre, il invite à s’asseoir, désignant un vieux canapé de cuir défoncé. Vieillissant et bedonnant, il sourit, l’air content de ses mauvaises fréquentations :

Ici s’est assis tout ce que la Russie compte d’ultranationalistes mais aussi le chef des néonazis allemands, le patron de l’un des cartels de la drogue de Bolivie.

La difficulté est que, sur certains dossiers, comme la lutte contre le groupe Etat islamique, il a les mêmes intérêts que l’Occident, mais avec des alliances différentes. Washington cherche les voies et moyens d’une coopération sur ce dossier. Mais, en Syrie comme en Ukraine, Poutine ne fonctionne qu’au rapport de force, et à ce jeu-là, il est pour le moment le plus fort.

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Moscou et Téhéran resserrent leur coopération militaire en Syrie.

Image fournie par le ministère de la défense russe d’un Tu-22M3 durant des frappes sur Alep en Syrie le 16 août.

Pour la première fois depuis le début de l’intervention militaire russe déclenchée il y a près d’un an, en septembre 2015, des bombardiers Tupolev-22M3 et des Soukhoï-34 ont visé des positions tenues par des djihadistes en Syrie depuis l’Iran. Cette action conjointe est sans précédent, tant du côté russe, qui n’avait jamais encore utilisé une base aérienne extérieure autre que celle dont elle dispose en Syrie, à Hmeimim, que du côté iranien où aucune puissance militaire étrangère n’avait jamais été jusqu’ici autorisée à mener des opérations militaires depuis son territoire. Alliés indéfectibles du régime syrien de Bachar Al-Assad, Moscou et Téhéran ont franchi, mardi 16 août, un pas supplémentaire dans leur coopération.

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Selon le ministère russe de la défense, les bombardiers Tupolev-22M3 et Soukhoï-34 ont décollé mardi de la base de Hamedan, située dans le nord-ouest de l’Iran, pour aller frapper des cibles de l’organisation Etat islamique (EI) et du Front Fatah Al-Cham (ex-Front Al-Nosra) « dans les provinces d’Alep, de Deir ez-Zor et d’Idlib », permettant de détruire « cinq dépôts d’armes et de munitions, des camps d’entraînement à Deir ez-Zor, Sarakab [Idlib] et Al-Bab [Alep] ». Les avions russes ont également visé « trois centres de commandement » dans les régions de Jafra et Deir ez-Zor, où « un grand nombre de combattants » auraient été tués.

A Alep après les frappes russes le 16 août.

Moscou et Téhéran « échangent des moyens et des infrastructures » dans le cadre de « la lutte antiterroriste », a pour sa part commenté le secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale iranien, Ali Shamkhani, à l’agence de presse d’Etat Irna. Ces frappes décidées avec l’aval de l’Iran avaient été précédées par la visite, lundi, du vice-ministre russe des affaires étrangèresMikhaïl Bogdanov, reçu par le chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif.

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Au moins 19 civils, dont 3 enfants, ont été tués dans deux quartiers rebelles d’Alep, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, après les bombardements de mardi. En parallèle, l’ONG Human Rights Watch a accusé les aviations russe et syrienne d’avoir fait usage à plusieurs reprises de bombes« incendiaires » pour des raids « honteux » sur le nord de la Syrie.

Au moins 30 personnes sont mortes à Raqqa. Ici, un bombardement en Syrie en mars 2016 (photo d'illustration) - AFP

« Tripler l’efficacité » des Tupolev

Basés à Mozdok, en Ossétie du Nord, les bombardiers à longue portée Tupolev-22M3 sont déjà intervenus en Syrie. Partis le 14 août de Stavropol, dans le Caucase russe, ils ont mené ce jour-là des frappes avant de se poser pour la première fois à Hamedan, en Iran, d’où ils ont redécollé deux jours plus tard.

Pour Konstantin Sirkov, président de l’Académie des questions géopolitiques cité par l’agence de presse RIA Novosti, l’utilisation de la base iranienne permet non seulement de réduire le temps d’intervention mais surtout de « tripler l’efficacité »des Tupolev-22M3, capables d’embarquer 22 tonnes de bombes à quelque 800 kilomètres de distance contre 5 à 8 tonnes à 3 000 kilomètres. La base syrienne de Hmeimim n’a pas la capacité de les accueillir.

Mardi, le colonel américain Chris Garver, porte-parole de la coalition contre l’EI pilotée par les Etats-Unis a indiqué que Washington avait été prévenu peu de temps avant le début de ces frappes. Selon Interfax, la Russie a par ailleurs demandé l’autorisation de l’Iran et de l’Irak pour tirer des missiles de croisière au-dessus de leurs territoires à partir de la mer Caspienne. Ce qu’elle a déjà fait en octobre 2015 en tirant une salve de SS-N-30, des missiles de croisière navals équivalents aux Tomahawks américains.

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Russie : des agents du Mossad et des officiers étrangers ont été tués lors d’une frappe à Alep.

Selon une « source sur le champ de bataille », les médias nationaux indiquent que ses navires de guerre ont bombardé 30 officiers israéliens, qataris et occidentaux.

Des combattants syriens pro-régime dans les rues de Ramussa, après leur prise de contrôle d'un district stratégiquement important dans la banlieue d'Alep la veille, le 9 septembre 2016. (Crédit : AFP/George Ourfalian)

L’agence de presse russe a signalé que des agents israéliens du Mossad ainsi que d’autres officiers étrangers ont été tués à Alep mardi, dans une attaque de missile opérée par la Russie.

Selon la version en langue arabe de l’agence de presse russe Sputnik, quelque « 30 officiers israéliens et occidentaux » ont perdu la vie, frappé par trois missiles de croisières Kalibr, tirés par des navires de guerre dans la “foreign officers’ coordination operations room”, à l’ouest d’Alep, près du mont Siméon.

En plus des agents du Mossad, l’article russe indique que des officiers militaires américains, qataris, saoudiens, britanniques et trucs – soit tous les pays que l’Iran, la Syrie et la Russie détestent – ont été atteints par la frappe, selon une « source [présente] dans le champ de bataille ».

Les officiers étrangers « dirigeaient les attaques terroristes à Alep et à Idleb », rapporte l’agence de presse iranienne Fars, faisant référence aux groupes rebelles qui contrôlent les villes en Syrie.

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Le gouvernement israélien n’a pas réagi à la demande de commentaires.

Plus de 300 000 personnes ont été tuées depuis que le conflit a éclaté en mars 2011, et des manifestations réclament l’éviction du président Bachar el-Assad.

Une trêve était supposée être en vigueur autour d’Alep, depuis le 13 septembre. En dépit de quelques violations, la trêve était parvenue à ramener le calme dans la ville. La semaine dernière, l’armée syrienne a annoncé qu’elle respecterait un moratoire sur les combats jusqu’au 19 septembre à minuit.

Alep, l’une des plus grandes villes du pays arabe, est un atroce champ de bataille depuis 2012, divisée entre les zones dirigées par le gouvernement et celles aux mains des rebelles.

Cet été, plus de 250 000 personnes, qui vivaient dans les quartiers de l’opposition, ont subi un blocus total de 40 jours après que les forces du gouvernement ont conquis toutes les routes.

Des renforts rebelles ont percé le blocus en août. Mais de très lourds bombardements dans les semaines qui ont suivi ont tué plus de 700 civils. Les troupes syriennes, soutenues par les frappes aériennes russes, ont récupéré les routes et ont restitué le siège. La trêve qui a suivi a confirmé la position des deux parties.

SYRIA

Damaged buildings and rubble line a street in Homs, Syria, Sept. 19, 2016. Syria’s military command has declared the U.S-Russian brokered cease-fire over, blaming the rebel groups for undermining it. In a statement Monday, the Syria military said “the armed terrorist groups” repeatedly violated the cease-fire which came into effect last week. (AP PHOTO)/DAM101/16263628541649/1609191959

 

 

Bon comme un citron bien rond !

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