Le père de la révolution cubaine est mort à l’âge de 90 ans. Héros romantique, leader totalitaire, anti-américain, vieillard évincé… Vioci les multiples visages du « commandante ».
Le « Lider Maximo », qui a tenu son île d’une main de fer depuis la révolution de 1959 et défié la superpuissance américaine pendant plus d’un demi-siècle, avait cédé le pouvoir à son frère Raul à partir de 2006 après une hémorragie intestinale.
Il avait abandonné en avril 2011 ses dernières responsabilités officielles, en cédant son poste de premier secrétaire du Parti communiste de Cuba (PCC) à Raul, numéro deux du parti depuis sa fondation en 1965.
Fidel Castro étudiant, en 1945. L’image est accompagnée de cette appréciation de ses professeurs : « étudiant en droit distingué et bon athlète, très populaire, promis à un brillant avenir ».
Son décès, qui survient à peine deux ans après l’annonce historique du rapprochement entre Cuba et les États-Unis, vient définitivement tourner la page de la guerre froide, qui a mené le monde au bord du conflit nucléaire lors de la crise des missiles d’octobre 1962.
En juillet 1953, à 27 ans, le jeune avocat engagé dans la lutte armée contre la dictature de Batista s’attaque à la caserne de la Moncada à Santiago de Cuba, deuxième place militaire du pays, avec une centaine de militants. Il est ici interrogé par le chef de la garnison, arrêté puis condamné à la prison et à l’exil, il lancera lors de son procès en octobre de la même année : « Condamnez-moi, peu m’importe, l’histoire m’absoudra ».
Fidel Castro semblait immortel. Durant plus de 50 ans de règne à la tête de Cuba, « El commandante » a survécu à une tentative d’invasion militaire américaine, déjoué de multiples tentatives d’assassinats, esquissé un sourire face à l’embargo économique toujours officiellement en place. Pourtant, celui que l’on pensait éternel, s’est finalement éteint, ce vendredi 25 novembre, à l’âge de 90 ans.
Fidel Castro photographié pendant une interview à New York en 1955 à l’époque où, libéré, il se met à chercher des fonds pour financer sa lutte. Il bénéficie alors d’une certaine popularité aux États-Unis, qui voient en lui un défenseur de la démocratie.
Etudiant révolté, héros romantique, leader totalitaire, anti-américain, vieillard évincé… les multiples visages de Fidel Castro ont déchaîné les rêves d’un peuple et façonné la révolution d’une île à la dérive, bariolée par les restrictions et les intimidations, au grès des décennies. La preuve en 5 vidéos.
Elève révolutionnaire.
Né le 13 août 1926, à Birán dans la province de Holguín, Fidel Castro n’a pourtant pas l’âme d’un Cubain. Adolescent, quand ses amis s’évadent sur les rythmes tropicaux du mambo ou du chachacha, lui préfère battre seul la mesure en lisant. C’est à l’université de La Havane, où il étudie le droit, que le jeune Castro fait ses gammes. Mais, l’étudiant préfère sécher les cours pour se forger une conscience auprès des mouvements politiques de gauche.
Il débarque clandestinement sur l’île avec ses hommes en 1956 et lance la guérilla contre l’armée. Ici en juin 1957, le futur dirigeant est photographié dans la Sierra Maestra avec les commandants de la guérilla dont Ernesto Guevara, deuxième à partir de la gauche.
Sa lutte prend véritablement des accents révolutionnaires lorsqu’il fait de la dictature pro-américaine de Fulgencio Batista un combat personnel. De futures figures emblématiques, comme Ernesto « Che » Guevara, s’engagent à ses cotés. Après quelques putsch ratés, Castro et des centaines de guérillos réussissent à faire tomber la Caserne Columbia, fief de la junte militaire du dirigeant Batista, contraint à la fuite. Le 3 février 1959, Fidel Castro prend les rênes du pays en tant que Premier ministre. La Revolución se consomme avec un cigare aux lèvres.
Batista renversé, le chef de la révolution prononce un discours après la prise de la Havane, en janvier 1959.
Héros populaire.
Dès les premiers mois au gouvernement, Fidel Castro met en place une nationalisation complète de l’industrie et des banques du pays, ainsi qu’une vaste réforme agraire. L’épuration des détracteurs, dirigée par le « Che », réduit au silence éternel les opposants au régime. Parmi eux, d’ancien militaires batistiens. Certains seront immédiatement fusillés, d’autres emprisonnés.
Fidel Castro et Camilo Cienfuegos, commandant de l’Armée révolutionnaire, à Santiago, le 4 janvier 1959, deux jours après la prise du quartier général de l’armée de Batista. Cette autre grande figure de la révolution disparaîtra mystérieusement en octobre de la même année.
L’Amérique de Kennedy regarde d’un très mauvais œil son voisin cubain. En vue de préparer un débarquement à Cuba, la CIA entraîne les exilés anti-castristes au combat. Les 15 avril 1961, des bombardiers aux couleurs de l’armée cubaine attaquent la Havane et Santiago. Deux jours après, des batistiens débarquent dans la Baie des Cochons et tentent de provoquer un soulèvement populaire. Cette opération est un échec cuisant pour les Etats-Unis. Vainqueur triomphal, l’icône de la révolution est à l’apogée de sa popularité au sein de son pays.
Avec Che Guevara dans les années 1960 à La Havane. En 1965, Fidel Castro refonde le Parti communiste cubain et en devient le premier secrétaire inamovible. Il muselle par ailleurs toute forme d’opposition.
Fumeur anti-américain.
Fidel Castro a bien compris que pour grandir, il doit défier les Etats-Unis. Et rien ne pourra se faire sans sa grande soeur communiste : l’Union soviétique. C’est ainsi que dès les années 1960, l’anti-américanisme du Líder Máximo atteint son paroxysme. Pour assurer la protection de Cuba, le premier secrétaire du parti communiste de l’URSS, Nikita Khrouchtchev, décide de déployer des missiles balistiques à moyenne portée sur le sol cubain.
Lors de sa rencontre avec des sénateurs américains à La Havane, le 29 septembre 1974. Entre temps, le Premier ministre s’est rapproché de l’URSS et est devenu un symbole de l’anti-impérialisme américain.
En pleine Guerre Froide, l’amertume entre les deux blocs conduit à la rupture de leurs relations diplomatiques, le 3 janvier 1961. Seul moyen pour essouffler Castro l’insoumis, le président Eisenhower décide d’installer un embargo économique, commercial et financier, le 7 février 1962. Pris à la gorge, Castro, les armes rangées, tente de résister.
Avec son frère Raul pendant une cérémonie pour célébrer le 25e anniversaire du triomphe de la révolution Cubaine, le 8 janvier 1984. C’est Raul Castro qui a annoncé sa mort à la télévision.
Résistant totalitaire.
Au fil des années, Cuba se met le monde à dos. Etouffés par le blocus, des milliers de Cubains essaient tant bien que mal de quitter l’île. Mais Fidel Castro, totalitaire, conduit d’une main ferme son peuple et n’hésite pas à soutenir les guérillas communistes dans le monde, en envoyant notamment, dès 1975, ses troupes militaires en Afrique.
Fidel Castro montre une statue de Lénine au président soviétique Mikhaïl Gorbatchev lors d’une cérémonie le 3 avril 1989 à La Havane.
Pourtant, après 17 ans de crise entre les Etats-Unis et Cuba, la détente semble de plus en plus envisageable. Pour la première fois depuis le blocus, le 17 mai 1977, un bateau américain, avec à son bord près de 400 touristes, fait son entrée dans le port de la Havane. Le début d’une nouvelle ère « libérale » pour Cuba et son dirigeant.
Le 27 juillet 1991, le président cubain reçoit son homologue sud-africain Nelson Mandela lors de la célébration de la « Journée de la Révolution » à Matanzas.
Vieillard décontracté.
Avec la chute de l’URSS, Cuba plonge dans une crise économique sans précédent. Le robinet d’aide soviétique arrête de couler et le peuple cubain en est le premier touché. Le régime castriste vieillit en même temps que son dirigeant. Le 31 juillet 2006, le héros révolutionnaire est victime d’une crise intestinale aiguë et doit céder temporairement le pouvoir à son frère, alors premier vice-président du Conseil d’État.
L’esprit de la révolution cubaine s’est répandu dans toute l’Amérique latine, notamment au Venezuela, où Hugo Chavez se réclame du « Lider Maximo ». Ici, le dirigeant vénézuélien avec Fidel Castro, lors d’une cérémonie de remise des diplômes des étudiants à La Havane, le 20 août 2005. Ils lancent l’Alternative bolivarienne pour les Amériques, qui devait réunir les pays socialistes d’Amérique latine.
Après 50 ans de pied de nez face au géant américain, Fidel cède la place à Raúl, jusqu’à son retrait officiel de la présidence de l’Etat cubain, le 24 février 2008. En public, le vieillard évincé troque son uniforme militaire contre des survêtements de marques de sports. Comme si les combats d’antan étaient dorénavant bien terminés.
Le père de la révolution cubaine est décédé à l’âge de 90 ans. Il a défié 11 présidents américains et survécu à 638 complots pour l’assassiner.
Fidel Castro, le père de la révolution cubaine, qui a tenu son île d’une main de fer et défié la superpuissance américaine pendant plus d’un demi-siècle avant de céder le pouvoir à son frère Raul, est mort vendredi 25 novembre au soir, à l’âge de 90 ans.
Fidel Castro reçoit le dirigeant chinois Xi Jinping, le 22 juillet 2014 à La Havane. En 2006, affaibli par des problèmes de santé, il doit abandonner le pouvoir à son frère Raul.
« Le commandant en chef de la Révolution cubaine est décédé à 22h29 ce soir » (4h29 samedi à Paris), a annoncé Raul Castro en lisant une déclaration sur l’antenne de la télévision nationale.
Le 11 mai 2015, François Hollande est le premier dirigeant occidental à se rendre à Cuba depuis la révolution. Quelques mois auparavant, en décembre 2014, les Etats-Unis et Cuba avaient annoncé une normalisation des relations entre leurs deux pays.
Le président Raul Castro n’a pas révélé les causes du décès, mais il a précisé que sa dépouille serait incinérée. « Conformément à la volonté exprimée par le camarade Fidel, sa dépouille sera incinérée dans les premières heures » de la journée de samedi, a-t-il dit.
Avec le pape François, le 20 septembre 2015. Le pape se félicite lors de ce séjour à Cuba « d’un événement qui nous remplit d’Espérance: le processus de normalisation des relations entre deux peuples, après des années d’éloignement ».
« L’organisation de l’hommage funèbre qui lui sera rendu sera précisée » ultérieurement, a-t-il ajouté dans cette brève allocution conclue par un tonitruant : « Jusqu’à la victoire, toujours ! » (« Hasta la victoria, siempre »), l’antienne bien connue du Comandante.
Le fondateur de la révolution cubaine et figure majeure de l’histoire du XXe siècle s’est éteint à l’âge de 90 ans. Retour en images sur la vie du « Lider Maximo », libérateur devenu autocrate. Ci-contre, Fidel Castro prononce un discours lors d’un rassemblement à la Plaza de la Revolución à La Havane, le 29 avril 2006.
L’une des dernières apparitions publiques de l’ancien dirigeant, lors du congrès du Parti communiste cubain à La Havane, le 19 avril 2016. Son frère Raul a terminé son allocution télévisée annonçant la mort du père de la révolution cubaine par son légendaire mot d’ordre : « Hasta la victoria, siempre » (« Jusqu’à la victoire, toujours! »).