Ils étaient pressentis pour recevoir le prix Nobel de la Paix. Zoom sur une organisation humanitaire qui existe depuis 3 ans et revendique avoir sauvé les vies de 62.000 personnes en Syrie.

Civils, sauveteurs et bombardés : qui sont les casques blancs syriens ?

George Clooney, Susan Sarandon, Alicia Keys et Ben Affleck avaient signé une pétition pour que leur soit remis le prix Nobel de la Paix, mais le président Juan Manuel Santos les a coiffés au poteau.

Depuis 2013, les casques blancs agissent en dehors des zones contrôlées par le régime syrien et interviennent après les bombardements. N’étant pas armés, ayant fait vœu de neutralité, ils portent secours à toute personne nécessitant des soins médicaux sur le terrain. Qui sont-ils ? Dans quelles conditions œuvrent-ils ? On fait le point.

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62.000 vies sauvées.

La Défense civile syrienne est une organisation humanitaire créée en 2013 à l’initiative d’un consultant britannique qui travaillait auprès de l’opposition et avec le soutien d’une ONG turque, Akut. Spécialisée dans la recherche de victimes et des premiers secours, cette ONG a d’abord contribué à la formation d’une vingtaine de volontaires syriens. Trois ans plus tard, ils sont près de 3.000 et revendiquent le sauvetage de 62.000 personnes.

Médecins, plombiers, boulangers, enseignants, ils doivent leur nom aux casques blancs qu’ils portent sur la tête. Leur équipement est financé entre autres par la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, le Danemark et les Etats-Unis. Selon le site internet de l’organisation syrienne, 145 d’entre eux sont morts en essayant de sauver des vies.

James Sadri, responsable de le président Juan Manuel Santos, la première ONG à les avoir médiatisés, expliquait récemment leur rôle à RFI :

« Les Casques blancs interviennent principalement à Alep et Idlib. Leur mission est d’intervenir dans les zones où il n’y a plus un seul service public qui fonctionne et où les services de l’Etat ont totalement disparu. Dans des endroits où il n’y a plus ni écoles ni hôpitaux ni aucun service public. »

En septembre 2016, Netflix leur a consacré un documentaire de 40 minutes intitulé « White Helmets »[« Casques blancs », NDLR]. C’est une compilation de plans qui résume sans ambages l’extrême complexité de leur travail de terrain, partagé entre la crainte d’être eux-mêmes bombardés ou abattus lors d’une intervention, et l’urgence de localiser et d’extraire d’éventuelles victimes des décombres.

Parmi les séquences les plus dures, le sauvetage d’un nourrisson, miraculeusement vivant après l’explosion de l’immeuble où il vivait.

Dans le collimateur de Bachar.

Financés par les Européens et les Etats-Unis, soutenus par des acteurs internationaux qui ne cachent plus leur aversion pour le régime syrien, les casques blancs sont dans le collimateur du dictateur Bachar al-Assad et de la Russie, qui les assimilent à des agents de l’occident ou à des terroristes proches d’Al-Qaïda. Des accusations balayées notamment par Médecins du monde :

Dans un entretien récent accordé à l’Associated Press, le dirigeant syrien a d’ailleurs dénoncé le caractère politique du prix Nobel de la paix au moment où les casques blancs étaient pressentis pour le recevoir.

Régulièrement ciblés par les frappes russes et syriennes, les « White Helmets » peinent aujourd’hui à travailler. Leurs véhicules et « leurs casernes de fortune » sont prioritairement ciblés, comme l’explique Benjamin Barthe, le correspondant du « Monde » au Liban.

Pour Raed Saleh, responsable actuel de la Défense civile syrienne, l’attitude de Bachar al-Assad est sans équivoque : « Si Alep tombe, je suis convaincu que le régime fera tout pour appréhender les casques blancs. »

Les "White helmets" le 23 juillet 2016 à Alep en Syrie

Ammar Salmo, le responsable des casques blancs d’Alep, avait déclaré récemment au micro d’Europe 1 :

« Si on a le prix Nobel de la paix, ça ne sera pas une victoire seulement pour les casques blancs mais pour tous les civils syriens… pour montrer au monde qu’il y a des Syriens qui veulent la paix. »

Seulement voilà, l’histoire leur a fait faux bond.

Le prix Nobel de la paix attribué au président colombien Juan Manuel Santos !

Juan Manuel Santos le 5 octobre.

Un volontaire sauve un bébé et fond en larmes.

Ce membre des Casques blancs de la Défense civile syrienne affirme avoir creusé pendant plusieurs heures avant de retrouver la petite fille vivante après un bombardement sur Idlib, près d’Alep.

Poignant. Une vidéo publiée jeudi par un indépendant sur YouTube montre un homme transporter un bébé dans une ambulance après l’avoir sauvé des décombres. La scène s’est déroulée à Idlib, ville voisine d’Alep, dans la nuit de mercredi à jeudi. Alors que les secours prodiguent les premiers soins au bébé en le badigeonnant, ce volontaire, un Casque blanc de la Défense civile syrienne, serre la petite fille dans ses bras, avant de fondre en larmes. À la fin de la vidéo, on voit le nouveau-né tousser et pleurer alors que les médecins lui ont placé des bandages sur le visage.

Interrogé sur les circonstances de ces événements, le volontaire raconte qu’une frappe aérienne a eu lieu sur Idlib. Selon lui, les bénévoles «ont entendu le bébé pleurer sous les décombres» et ont dû creuser pendant plusieurs heures avant de le retrouver vivant. «Je ne peux pas croire qu’elle a survécu à ce supplice», raconte le sauveteur.

L’enfant s’appelle Wahida et elle a 4 mois.

Les frappes aériennes se sont intensifiées ces derniers jours en Syrie. Jeudi, les bombardements à Idlib ont fait au moins 21 morts, d’après l’observatoire syrien Local coordination committees of Syria. Dans la vidéo, on peut entendre plusieurs personnes crier «Bashar, Bashar», dont un bénévole pointer du doigt le ciel en évoquant le nom du président syrien.

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Les Casques blancs.

Les Casques blancs font partie de la Défense civile syrienne, créée en 2013 par James Le Mesurier, consultant et ex-militaire britannique, également fondateur de l’ONG Mayday Rescue. L’organisation est aujourd’hui financée par la Grande-Bretagne, le Danemark, les Pays-Bas, le Japon ou encore les États-Unis. Les pays participent autant à la formation qu’à l’équipement des 3000 volontaires qui oeuvrent chaque jour en Syrie. Les Éats-Unis auraient ainsi aidé les Casques blancs à hauteur de 23 millions de dollars en 2015, selon l’Agence pour le développement international.

L’organisation assure être indépendante et impartiale. Mais Moscou et Damas ont assuré qu’elle avait collaboré avec l’organisation terroriste du Front Al Nosra, devenu Front Fatah al-Cham. Ils affirment par exemple que les Casques blancs ont soigné certains djihadistes blessés. «Nous ne faisons pas de distinction sur le terrain. Nous sauvons toutes les vies, même si de fait, nous intervenons essentiellement dans les zones libérées ou sous contrôle de l’État islamique», se justifiait Raed Saleh, le chef de l’organisation, à France 24, en 2014.

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Prix Nobel?

L’action de ces volontaires apparaît notamment dans le documentaire Les Casques blancs, réalisé par Orlando von Einsiedel et sorti sur la plateforme Netflix, le 16 septembre dernier. Une pétition a même été lancée il y a quelques mois par l’association Syria Campaign pour que cette organisation obtienne le prix Nobel de la paix. Des célébrités comme les acteurs George Clooney, Ben Affleck, Daniel Craig ou Daniel Day Lewis l’ont déjà signée. Elle a recueilli près de 160.000 signatures.

Ces héros anonymes ont décroché le Right Livelihood Award la semaine dernière, un prix plus connu sous le nom de «prix Nobel alternatif». «Ils vont là où les bombes tombent et sortent les victimes des ruines, des gravats des maisons qui ont été bombardées», avait déclaré le directeur de la fondation, Ole von Uexkull. «Beaucoup en Syrie espèrent que s’il y a un accord de paix, les Casques blancs seront ceux qui aideront à reconstruire le pays.»

Outre les distinctions, le combat se poursuit pour la Défense civile. Mercredi, les deux plus grands hôpitaux d’Alep ont été bombardés. La semaine dernière, trois centres médicaux avaient été visés ainsi que deux centres des Casques blancs. Raed Saleh, avait notamment averti qu’Alep ne tiendrait «pas plus d’un mois» en raison de la destruction des services publics. «Il n’y aura plus d’eau, plus d’électricité, plus de carburant et les hôpitaux ne pourront plus continuer à fonctionner», avait-il ajouté.

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Le témoignage effrayant d’un instituteur à Alep.

Pierre Le Corf est un français de 27 ans qui partage le quotidien des habitants de la ville syrienne.

©Pierre Le Corf

« Parfois je suis épuisé. J’essaye de ne pas montrer trop d’images difficiles pour ne pas pourrir votre quotidien, aider les gens ici ne veut pas dire vous importer la guerre, la souffrance au quotidien, mais la connaissance de ce qui se passe, essayer de vous montrer à travers mes yeux… J’ai tout essayé… Ce n’est pas mon sang, je n’ai pris que de tout petits éclats. Un premier mortier est tombé quand je partais de chez moi, je suis tombé par terre, une partie d’un building s’est effondrée mais je n’ai rien eu, les magasins qui se ferment, la fumée qui envahit la rue, les gens qui courent s’abriter. Je cours moi aussi, mais 300 mètres plus loin je suis projeté par terre, un autre mortier vient de tomber sur un générateur en plein centre-ville, je n’entends plus rien, je me relève, juste un sifflement puis en tournant la tête le sang, les cris d’un homme par terre avec une partie du bras et l’épaule arrachée j’essaye de stopper l’hémorragie, je le tire de l’autre côté de la rue à l’abri, je cours un homme hurle pour que l’on aide son père, ses pieds sont arrachés ne tiennent plus que par son pied, ses doigts pendent et sa cuisse est éventrée. J’essaye putain mais on le met dans une voiture, il s’est presque vidé de son sang déjà. Ils sont morts je viens de l’apprendre.

« Ce matin j’allais boire un café, il y avait du soleil et un ciel bleu, puis tout est devenu noir et rouge… »

La dernière fois je bouchais l’impact de balle dans le ventre d’un homme touché par un sniper, une autre fois je mettais dans un petit camion un homme dont une jambe avait été arrachée, et j’en passe … je vous demande seulement d’essayer de ressentir, essayer d’imaginer ce que ça veut dire que de se battre pour les gens puis en ramasser les morceaux dans la rue, des gens, qui, comme vous vont au travail, emmènent leurs enfants à l’école, vont boire un café, ont des rêves pour demain puis l’enfer … des gens qui ne demandent rien, qui voulaient juste vivre ce matin, et comme chaque jour voilà ce qui arrive. Je voyais ces deux hommes tous les jours, imaginez que ce soit votre quotidien, que ce soit vos enfants, votre père, votre soeur, parce que en continuant de soutenir cette guerre, en continuant de soutenir ces sois disants rebelles qui massacrent les gens au hasard vous soutenez ce qu’ils font, vous êtes ceux qui vont font tant peur en Occident mais loin des yeux loin du coeur…

Ce matin j’allais boire un café, il y avait du soleil et un ciel bleu, puis tout est devenu noir et rouge, je vous demande simplement d’essayer de ressentir, les projectiles tuent de l’extérieur mais aussi de l’intérieur, cette guerre provoque des dommages terribles auprès de centaines de milliers d’innocents, je vous demande simplement de ne pas oublier ceux qui vivent ici et de ne plus donner plus de munitions à ceux qui nous tuent, d’essayer de comprendre, pitié juste essayez de comprendre et de vous faire votre propre idée plutôt que d’avaler tout ce que l’on essayer de vous fourrer dans le crâne, ça coûte des vies. »

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Bon comme un citron bien rond !

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